Priska Lutumba Tingaud

Priska LUTUMBA TINGAUD soutient sa thèse en Psychologie et Ergonomie, Spécialité : Psychologie.

•

Le renouvellement du métier et des pratiques d'éducateurs spécialisés de la protection de l’enfance dans une activité nomade, soutenue par des environnements technologiques collaboratifs

Sous la direction de M. Marc-Éric BOBILLIER CHAUMON, Professeur des Universités en Psychologie du travail (Cnam)
et co-encadré par M. Yvon MIOSSEC, Maître de Conférences en Psychologie (Cnam)

Jury

• Mme Sandrine CROITY-BELZ, Professeure, Université de Toulouse : Rapporteure
• M. Jacques POUYAUD, Professeur, Université de Bordeaux : Rapporteur
• M. Marc-Éric BOBILLIER CHAUMON, Professeur, Cnam : Directeur de thèse 
• M. Yvon MIOSSEC, Maitre de conférence, Cnam : Co-encadrant de thèse
• Mme Sabrina ROUAT, Professeure, Université de Lyon 2 : Examinatrice 

Résumé de thèse

Cette thèse porte sur la compréhension du renouvellement du métier et des pratiques d'éducateurs spécialisés dans une activité nomade, soutenue par des environnements technologiques collaboratifs.

Elle a pour origine une intervention de recherche menée auprès d’éducateurs spécialisés de la protection de l’enfance au sein d’une maison d’enfance à caractère social (MECS). La spécificité des professionnels de notre étude est qu’ils exercent exclusivement en dehors des murs de l’établissement, alors que ces éducateurs de la protection de l’enfance travaillent habituellement en internat, au sein des murs de l’institution. Le modèle de prise en charge des bénéficiaires s’appuie sur celui du dispositif de placement éducatif à domicile (PEAD). Ce dispositif concerne les familles dont les enfants sont placés au domicile de leurs parents. Ces derniers ayant une injonction d’obligation d’aide éducative adressée par le juge aux affaires familiales.

La perspective de cette recherche vise la compréhension des incidences des changements sociotechniques et socio-organisationnels de ce modèle émergent d’organisation du travail dans l’activité de ces professionnels. Elle situe les contributions de ce travail de thèse du côté de la théorie et des méthodes. L’apport théorique repose sur l’articulation des approches conceptuelles de la clinique de l’activité et de la clinique des usages pour appréhender la manière dont le métier et les collectifs sont convoqués dans une activité nomade. Ce travail aborde également la façon dont sont mis en œuvre les processus d’acceptation située de ce modèle organisationnel et des environnements technologiques associés. L’apport méthodologique réside dans les ajustements des méthodes en clinique de travail nécessaires pour aborder une activité dispersée, éclatée et multisituée.

Nous avons construit un dispositif méthodologique autour d’espaces dialogiques privilégiant la confrontation des salariés aux traces de leur activité (photos, notes de liaison, comptes-rendus de séances de travail, etc.). Ces espaces dialogiques collectifs ont été mis en place afin d’interroger : (1) le métier d’éducateurs spécialisés « hors les murs », (2) l’organisation de la mobilité et du temps de travail et (3) l’usage des outils numériques.

L’analyse du matériau issu des espaces dialogiques de coanalyse de l’activité met en avant, d’une part, l’invisibilisation de certaines activités des éducateurs que nous caractérisons comme du métatravail et, d’autre part, les contraintes organisationnelles liées à la mobilité ainsi qu’à l’usage des environnements technologiques nécessitant d’être connectés entre eux.

Nous poursuivons ensuite la réflexion sur la conceptualisation du travail nomade et du nomadisme. Dans la littérature, la mobilité et le nomadisme sont souvent définis en référence à l’exercice des activités en plusieurs lieux, en-dehors des murs de l’entreprise ou permettant par exemple au travailleur en free-lance de réaliser son activité depuis n’importe quel coin du globe (le nomade numérique). Le travail de cette thèse propose d’envisager le nomadisme davantage comme un modèle organisationnel d’une entreprise ou d’une institution. Elle engage ensuite une discussion sur le nécessaire développement des pratiques et des méthodes des psychologues du travail pour appréhender ces modèles organisationnels émergents, et ce dès la conception des artéfacts du travail qui les soutiennent. Il y a donc pour la recherche en psychologie du travail des enjeux de mise en visibilité et d’utilité sociale de la discipline.

Mots clés : nomadisme ; travail nomade ; environnements technologiques ; clinique du travail ;
intervention-recherche ; protection de l’enfance 

•

Abstract 

This thesis aims at understanding the renewal of the profession and practices of specialized educators in a nomadic activity, supported by collaborative technological environments.

It is anchored in a research intervention which has been conducted among specialized child protection educators working in a childhood care institution.

Usually, child protection educators work within the walls of the social institution. But the specificity of the professionals involved in our research is that they work exclusively outside the walls of the institution. Indeed, the model used to care for the beneficiaries is based on their home placement system. This system concerns families whose children are placed in their own parents' homes. Thus, the parents are themselves required by a family court judge to provide educational assistance.

The purpose of this research is to understand the impact of socio-technical and socio-organizational changes in this emerging remote working model of organization. The contributions of this thesis are both theoretical and methodological. The theoretical contribution is based on the articulation of conceptual approaches from the Clinic of Activity and the Clinic of Use to apprehend the way in which the professionals and collectives are brought to work together in a nomadic activity. This work also addresses the way in which the processes of situated acceptance of this organizational model and associated technological environments are implemented. The methodological contribution lies in the adjustments to work-clinical methods needed to address a dispersed, fragmented, multi-site activity.

We have built a methodological framework based on dialogic spaces that encourage employees to confront themselves with the traces of their activity. These collective dialogic spaces were set up to explore : (1) the profession of “out-of-home” specialized educators, (2) the organization of mobility and working hours, and (3) the use of digital tools.

Analysis of the results of the dialogical spaces for co-analysis of activity highlights, on the one hand, the invisibilization of certain educators' activities, which can be characterized as meta-work and, on the other, the organizational constraints related to the mobility and the use of technological interconnected environments.

We then turn to the conceptualization of nomadic work and nomadism. In the literature, mobility and nomadism are often defined in reference to carrying out activities in several locations, outside the walls of the company or enabling, for example, the freelance worker to carry out his or her activity all over the world (the digital nomad). But this thesis proposes to consider nomadism as an organizational model for a company or institution. It then engages a discussion on the necessary evolution of the practices and methods of occupational psychologists to apprehend emerging organizational models, starting with the design of the work artefact that support them. For occupational psychology research, there are thus issues of visibility and social utility for the discipline.

Keywords : nomadism; nomadic work; technological environments; work clinic; 
intervention-research; child protection